Le dormeur du val est un poème d’Arthur Rimbaud (1854 – 1891) qui date du 7 octobre 1870, au moment de la guerre franco-allemande de 1870-1871. C’est un sonnet : il se compose de deux quatrains (strophes de quatre vers) et de deux tercets (strophes de trois vers). Les vers ont chacun douze pieds et sont donc des alexandrins.
Le poème
Dans un premier temps, prenez le temps de lire le poème tranquillement en essayant de vous imprégner de l’ambiance, du vocabulaire employé, ainsi que du rythme des vers.
C’est un trou de verdure où chante une rivière
Accrochant follement aux herbes des haillons
D’argent ; où le soleil, de la montagne fière,
Luit : c’est un petit val qui mousse de rayons.
Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort ; il est étendu dans l’herbe, sous la nue,
Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.
Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme
Sourirait un enfant malade, il fait un somme :
Nature, berce-le chaudement : il a froid.
Les parfums ne font pas frissonner sa narine ;
Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine
Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.
Comment le trouvez-vous ? Est-ce que vous aimez ce genre de poésie ? Et si vous essayiez de l’apprendre par cœur par vous même avant de poursuivre cet article ?… Vous pourrez constater que les nombreux enjambements rendent sa mémorisation quelque peu délicate. Et il en est de même concernant les images employées par le poète : elles sont particulièrement poétiques et réussies, mais cela les rend souvent trop abstraites et donc difficiles à mémoriser. Parfois aussi, on passe sans transition d’une image à l’autre, ce qui n’aide pas non plus. Bref, ce petit sonnet ne se laisse pas apprendre si facilement. Et vous, y parvenez-vous ?
La mémorisation
Je ne sais pas ce que vous avez réussi à apprendre, mais en ce qui me concerne, je suis incapable d’apprendre un texte pareil sans user de mémogination, de fantaisies, on peut même dire d’âneries. Et pour ce faire, je vous propose de créer des associations d’idées combinées à la méthode des lieux. Le mieux est ici de choisir un endroit qui vous évoque, de près ou de loin, le bord d’une rivière. En avez-vous un ? Alors nous commençons. Arthur, pardonne-nous !…
Premier quatrain
Au début de notre déplacement, au bord de la rivière, il y a un trou au milieu de l’herbe verte, un trou (au milieu) de (la) verdure. De ce trou sort mon chanteur préféré ou ma chanteuse favorite, qui chante évidemment une chanson que j’adore…
Puis je suis bousculé par une dame avec des crocs (pour ac-cro-chant) énormes. Elle est folle (pour folle-ment), ça se voit, et elle a de l’herbe, en guise de cheveux, avec des gousses d’ail (pour hail-lons) suspendues à sa coiffure. Non, mais, ça va pas la tête, madame ?…
Pour m’en débarrasser, je propose de lui acheter son ail. Alors je vais au distributeur -oui, car un distributeur est apparu soudainement au bord de la rivière !- pour retirer tout l’argent que j’ai sur mon compte. Et alors la machine se met à cracher des billets sans plus finir. De l’argent ! Encore de l’argent ! Mais c’est alors que je ressens une grande chaleur. Je lève la tête et je vois le soleil par-dessus la montagne, montagne en fer (pour approcher fière)…
Pour le dernier vers, qui est lui aussi loin d’être facile, je vous propose d’envisager la réécriture suivante : « Lui c’est un petit (che)val qui (a de la) mousse (sur le ment)on« , où l’on retrouve l’essentiel des syllabes ou des mots utilisés par le poète, mais d’une façon qui permet de visualiser un petit cheval avec de la mousse sur le menton. Il est là, à quelques pas du distributeur, sous les rayons du soleil, attendant simplement qu’on veuille bien s’occuper de lui. C’est tordu, mais tout de même plus simple à retenir, non ?…
Deuxième quatrain
Le premier vers du deuxième quatrain propose une image assez nette pour qu’on puisse la prendre telle quelle : on visualisera donc un soldat jeune, avec une grande bouche grand ouverte et un grand crâne chauve, pour insister sur l’adjectif nu. Peut-être une grosse mouche vole-t-elle de sa bouche à son crâne, pour bien informer notre boîte à émotions qu’elle doit se concentrer sur la bouche ainsi que sur la tête.
Par contre, le deuxième alexandrin est loin d’être évident, alors je n’hésite pas ! Il y a une femme nue (pour nu-que) qui se baigne (pour baignant) dans l’eau très fraîche (pour frais) ; elle frissonne (pour approcher cresson) et son corps devient tout bleu (pour bleu).
Au troisième vers, attention à l’enjambement avec le verbe dort ! Mais nous poursuivons notre chemin. En reportant notre regard sur la rive, un tas de pièces d’or (pour dort) étalé (étendu) dans l’herbe, sous la (femme) nue, qui est venue s’étendre dessus après son bain.…
Et pour finir ce quatrain, on a une pale (pour pâle) d’éolienne dans un lit vert éclairé par une lumière bleue (pour approcher pleut). Et je ne résiste pas au plaisir de vous montrer l’image produite par IA.
Premier tercet
Le premier vers nous parle des pieds d’un aïeul (pour gl-aïeul), un grand-père ou une grand-mère, des vieux pieds ridés mais dorés (pour dort), au milieu de souris (pour souri-ant) énormes qui mangent un gros morceau de tomme (pour approcher comme)…
Deuxième vers : un enfant malade de fait une addition (synonyme de somme)…
Au troisième vers : l’aïeul prend un yaourt nature dans un berceau (pour berce) et le tend à l’enfant, mais celui-ci le trouve trop chaud ! Il le met alors dans la rivière pour le refroidir (pour froid)…
Second tercet
Au premier vers de cette dernière strophe -vous aurez remarqué l’allitération en f-, de doux parfums, qui s’exhalent certainement du yaourt, font frissonner vos narines… Mais attention, car il est très compliqué de mémoriser quelque chose qui n’est pas là ou ne se fait pas. Ici, on ne peut pas dire à notre mémoire de visualiser des frissons qui n’ont pas lieu… Mais vous constaterez -magie du cerveau !- que cette correction se fait pour ainsi dire toute seule lors de l’apprentissage, car la partie rationnelle de vos neurones est toujours là pour étayer votre apprentissage.
Au deuxième vers revient une image mainte fois utilisée dans le poème, car Il dort encore, et en plus dans le soleil, ce qui ne facilite rien. Mais comme il a la main sur sa poitrine, je propose de se concentrer sur l’or de dort ainsi que sur le soleil et la main pour imaginer une sculpture de main tout en or que l’on élève dans le ciel en direction du le soleil.
Et pour finir, eh bien, il faut bien anticiper l’enjambement antre poitrine et tranquille, mais pour le reste je crois que l’image du poète est assez nette pour ne pas en rajouter…
*
Ouf ! vous devez avoir les neurones bien essorées après ce petit ‘fourzitou’ plus ou moins poétique. Le mieux est de faire une pause avant d’essayer de voir ce que vous avez déjà retenu. Et vous y reviendrez plus tard quand vous aurez constaté les endroits où vous achoppez. Vous y ajouterez alors vos propres indices.
Et si vous avez des idées originales, n’hésitez pas à les partager.
Pour toute commandes, rendez-vous sur la boutique de la mémogination.